Sommaire et edito - 1998

Isabelle Bougault

Bulletin 164

1998-03-02


164 : « Musiques actuelles, Education musicale actuelle ? » - 1998

Notre prochain congrès, présenté dans les pages suivantes, pose, et ce n’est pas la première fois, la question obsédante pour notre enseignement de la place qu’y occupent les expressions musicales contemporaines.
Sur la planète Musique d’un enfant ou adolescent d’âge scolaire, le professeur d’Education musicale n’est pas, loin s’en faut, sa seule source d’information. D’ailleurs, plus l’enfant grandit, plus les sources se multiplient...
Face à cette inévitable réalité, nous ne pouvons être ni les Don Quichotte du patrimoine musical de l’humanité, ultimes et héroïques défenseurs d’une superbe citadelle assiégée par des barbares venus de multiples autres mondes, ni, à l’inverse, les chevaliers serviles d’un Big Brother musical qui, avançant masqué, uniformiserait peu à peu les sensibilités qui font la richesse du monde.
Définir l’ambition de notre rôle éducatif revient d’abord à dénoncer ces deux démagogies, armes vaines et dérisoires au regard des enjeux de l’Education artistique dans la formation générale obligatoire.
Si notre travail quotidien avec les élèves nous rassure sans cesse sur la qualité des relations sensibles qu’ils peuvent entretenir avec les oeuvres du passé que l’on a bien voulu leur faire découvrir, il nous interpelle tout autant sur la force de nouvelles esthétiques dans le paysage sonore des enfants. Le cours d’Education musicale est un lieu de tolérance et ne peut alors s’arroger le droit de juger. Comme lieu d’écoute, il doit tout accueillir. Lieu d’expression enfin, il doit multiplier les possibles.
Tolérance, écoute et expression... Ce triptyque ambitieux et complexe peut, à sa façon, résumer l’Education musicale et permettre d’en mesurer l’urgence comme la place centrale qu’elle doit occuper dans la construction personnelle de chaque individu.

Quelque part, le reste n’est qu’accessoire...

Vincent MAESTRACCI
Président

Bulletin 165

1998-06-01


165 : « Inquiétudes ou perspectives ? » - 1998


Entre les réformes promises et les décisions qui se dessinent, nous aurions espéré un trajet plus rectiligne ! Hélas et encore une fois, des virages trop brutaux risquent de nous faire perdre nos plus précieuses cargaisons…

La réforme du lycée, que le Ministre souhaite mettre en place dès la prochaine rentrée nous interroge à plus d’un titre. Actuellement l’éducation musicale au lycée repose sur :

l’enseignement obligatoire dans la série L, à la fois généraliste et ambitieux par les perspectives qu’il offre aux élèves après le baccalauréat.

l’option facultative, qui procède parfois du bricolage quant à la pérennisation des heures d’une année à l’autre, qui aboutit à des situations parfois disparates, laissées au bon vouloir de chefs d’établissements soucieux en priorité des enseignements obligatoires, mais qui témoigne d’un souci d’ouverture à des cultures musicales très différentes.

des chorales, des orchestres (de rock de jazz, de musiques latino-américaine, de musique de chambre), des ateliers d’informatique...qui soulignent la diversité des approches de la musique proposées aux lycéens et qui fonctionnent bien car c’est l’enthousiasme des professeurs et des élèves (et eux seuls parfois) qui les font vivre !

Alors ne jetons pas tout cela en bloc mais donnons lui plus de force !
Il ne manque qu’un maillon pour que l’enseignement musical au lycée réalise l’ambition et la cohérence voulues par les ministres de l’éducation et de la culture : celui visant en priorité des élèves qui, pour des raisons sociales, culturelles ou tenant à la voie de formation choisie, n’ont jamais eu accès à ces pratiques musicales. C’est ici que de nouveaux ateliers d’expression artistique trouveraient toute leur place en s’appuyant sur les pratiques des adolescents, à des fins d’éducation aux musiques d’aujourd’hui, d’hier, d’ici ou d’ailleurs. Mais à condition que l’on reconnaisse les responsabilités fortes du professeur spécialiste par rapport au rôle d’éventuels intervenants extérieurs.

Nous mettons fortement en garde le Ministère contre la suppression pure et simple des options existantes. En effet elles permettent à un nombre significatif de lycéens de poursuivre, selon leur goûts et leurs projets, l’éducation musicale entamée au collège.

Nous regrettons bien entendu que le projet initial du rapport Meirieu, rendant obligatoire une expression artistique dans toutes le filières, soit le laissé pour compte de la réforme qui se dessine. Mais aujourd’hui comme hier, il nous semble qu’une véritable ambition pour les arts au lycée redéploierait et augmenterait les moyens actuels pour une nouvelle organisation, cette fois tri-partite : enseignement de spécialité visant un haut niveau de compétence, éducation musicale dans la continuité du collège, ateliers d’expression artistique pour répondre aux demandes réitérées de nombreux lycéens. Nous sommes déjà prêts à contribuer à l’évolution indispensable des contenus.

Violence, crise sécurité, civilité, citoyenneté, difficultés scolaires et sociales : plus que jamais, l’enseignement de l’art doit s’appuyer sur la responsabilité d’un corps de professeurs spécialistes. C’est à cette seule condition que les intervenants extérieurs seront, avec nous, les acteurs d’une réforme ambitieuse.

C’est aussi dans ce sens que, ayant été consultée pour redéfinir les maquettes des concours de recrutement, l’APEMU a pesé en faveur d’une meilleure adéquation entre le contenu des épreuves et les compétences indispensables à l’exercice de notre métier.

Les défis auxquels nous sommes confrontés exigent que l’APEMU assoie ses propositions sur une connaissance exhaustive des réalités du terrain et une représentativité renforcée.
C’est pour cette raison qu’un questionnaire, encarté au centre de ce journal, est envoyé dans les 7000 collèges et lycées de France. Vos réponses massives témoigneront de vos attentes et donneront d’autant plus de force aux propositions qui en découleront.

Au delà de nos inquiétudes, c’est de l’espoir que nous demandons pour les lycéens !
On ne peut désirer ce que l’on ignore, on ne peut aimer ce que l’on ne connaît pas. Attendre l’émergence du désir, c’est renvoyer à l’inégalité (1).

Odile TRIPIER
Présidente


(1) Meirieu Philippe, Apprendre …oui, mais comment ? Château Gontier, ESF édition, 1995, p 31.

Bulletin 166

1998-09-07



Editorial n°166 : « Si le cadre est à peu près défini, l’essentiel reste à faire. »

(1998)


Entre le dernier éditorial et celui-ci nous n’avons pas chômé. Nos divers courriers au ministre, au chef de cabinet et au conseiller technique en témoignent. Ces fermes mises en garde contre la suppression des options facultatives existantes ne sont pas restées lettre morte puisque le texte de la charte « un lycée pour le XXIème siècle », mentionne à trois reprises leur conservation « partout où elles existent ».

C’est en participant ainsi aux débats, officiels ou officieux, que l’APEMU est à même, aujourd’hui, de proposer ses exigences pour la mise en œuvre, très urgente (1), de la réforme du lycée et qu’elle a quelque chance d’être entendue. Nous agissons pareillement dans les discussions en cours sur le collège de l’an 2000. Au sein même de notre association les avis sont parfois très divergents. La rubrique « débats » de notre journal, n’en est que plus riche et représentative. C’est aussi pour cela que l’APEMU n’a pas été signataire de la plupart des manifestes dont l’argumentaire ne nous semblait qu’en partie recevable. Nous proposons des idées qui nous semblent être pondérées par l’écoute des diverses opinions formulées au sein des délégations. Nous invitons vivement tous ceux qui se sont crus seuls dans l’action à se rapprocher de l’APEMU afin de conjuguer nos efforts et décupler ainsi l’efficacité.

La réforme du lycée donc… Un premier pas est franchi dans la définition de ce que devraient être les «enseignements artistiques » au lycée dès la rentrée 99. Nous faisons le point, aussi objectivement que possible, de ce qui nous semble positif, parfois elliptique ou flou dans ce numéro du journal (voir pages XXX). Mais il reste à déterminer d’une manière très précise une mise en œuvre qui tienne compte des contraintes du terrain : une seule option au lieu de deux, recrutement des enseignants, rareté des postes dans les lycées, contenus des ateliers, évaluation des options et des ateliers, attribution des 72 heures, DGH, devenir des options facultatives à terme… Autant de question auxquelles l’APEMU est appelée à répondre dans les semaines qui viennent, avec exigence rigueur et fermeté.

Les premiers résultats du dépouillement de l’enquête nationale, ce week-end du 3 et 4 avril, nous permettent de dégager une richesse, une diversité de pratiques mais aussi une forte volonté de faire évoluer l’éducation musicale en France. Ces résultats témoignent également de très grandes difficultés à faire reconnaître, par l’institution, la nécessité de pérenniser toute action afin d’en mesurer les effets. Tout cela ne peut que contribuer, entre autre, à asseoir des exigences d’amélioration de nos conditions de travail en collège et lycée. Par contre il est à noter que le nombre de questionnaires reçus ne nous permet pas d’avoir une photographie suffisamment représentative. Nous vous invitons fortement à répondre à l’enquête, si vous ne l’avez déjà fait. Un dernier dépouillement sera effectué fin mai, à Toulouse, cette fois.

Odile TRIPIER
Présidente


NB : Au fait, quid de l’alignement des maximas de services qui devait être le corollaire de la réforme du lycée ? Non non, ce n’est pas du comique de répétition !