Audience du 6 juillet 2018
Compte rendu audience du 6 juillet 2018
L’APÉMu, représentée par sa présidente Anne-Claire Scébalt et Fernando Segui, vice-président, a été reçue par Matthieu Lahaye, conseiller de monsieur le Ministre de l’éducation nationale, Xavier Turion, directeur adjoint de la DGESCO, et Ghislaine Deslaurier.
Les deux sujets abordés sont le plan choral et la place de la musique dans la réforme du lycée.
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Plan choral
État des lieux
L’APÉMu a conduit une enquête sur la situation des chorales à la rentrée 2018. Elle a récolté 918 réponses, soit environ 10% des établissements scolaires, les chiffres sont donc à relativiser. À la rentrée 2018, 94,5% d’établissements seront dotés d’une chorale. La raison de l’absence de chorale est à 60% un problème de rémunération (contre 31% en 2017) et 31% un problème d’organisation.
En terme de rémunération, le cadre de l’option facultative tel qu’il est défini dans la loi est respecté dans 46 % des établissements qui dotent la chorale de 2h et plus. Pour lE MOMENT, il reste 53% des établissements qui consacrent moins de 2h à la chorale.
Nous faisons également remarquer que des collègues sont encore rémunérés en IMP pour des heures devant élèves au mépris de la Circulaire d'application parue au BO le 29 avril 2015.
Au-delà des heures, subsistent des freins et des difficultés :
Le sondage a récolté 200 réponses libres où les collègues déplorent de nombreuses difficultés. Notre association a vocation à faire connaître les situations concrètes c’est pourquoi nous avons relayé in extenso certains témoignages (entièrement anonymes) représentatifs :
- Difficultés pour installer la chorale comme enseignement facultatif :
29/06/2018 11:55:41
Toulouse
La direction souhaite l'année prochaine considérer la chorale comme activité péri-éducative ! Bras de fer en cours...
23/06/2018 12:32:30
Créteil
1 malheureuse IMP prévue pour rémunérer les heures de de chorale, donc en toute illégalité. J'abandonne. Je préfère faire du bénévolat dans ma vie privée.
16/06/2018 21:55:00
Versailles
Mon principal affirme n'avoir aucune information sur le plan chorale et donc n'a pas deux heures mais une seule pour la chorale. Il n'est donc pas prévu de trouver une heure libre commune à l'ensemble des classes afin que tout le monde puisse participer. Il m'a affirmé que l'annonce plan chorale n'était qu'un "effet d'annonce" politique n'ayant rien de concret pour lui.
- Difficultés d’organisation :
Dans de nombreux établissements la pause méridienne est en horaires décalés. Ceci implique d’organiser la chorale sur plusieurs jours pour pouvoir toucher davantage d’élèves. De fait, la chorale ne peut pas rassembler tous les niveaux et tous les élèves volontaires de l’établissement.
21/06/2018 12:14:19
Nantes
Le temps de répétition a lieu le midi dans un collège qui fonctionne en journée continue. Cela signifie que chaque année, un nombre important d’élèves sont privés d’accès à la chorale et que les répétitions sont très insatisfaisantes car limitées à un créneau de 55 min dans lequel il faut inclure le repas des choristes (donc une durée effective moindre...)
21/06/2018 08:54:53
Dijon
Je n’ai eu que la solution de faire la chorale en dehors du temps scolaire prévu aux emplois du temps des élèves 17h05 - 18h15. Obligeant de mettre à contribution les parents pour venir chercher leur enfant à l’issue de la séance de chorale. Collège rural, environ 90% des élèves sont transportés. Les bus ne font qu’un seul ramassage le soir, c’est à dire à 17h00. Le temps de pose méridien des élèves est majoritairement d’une heure, temps pour manger compris de 12h00 à13h00. 80% des élèves reprennent à 13h00. Par conséquent pas de place pour faire la chorale sur ce créneau horaire.
- Cumul
La possibilité de cumuler la chorale avec d’autres enseignement facultatif mériterait d’être rappelée, ainsi que leur prise en compte pour le DNB.
Réponse :
Ces chiffres avancés montrent un bilan très positif : en une année, le "plan chorale" s’est considérablement déployé. La mise en œuvre d’une telle politique implique un temps long et un réel travail de pilotage au plus près des établissements. L’importance des chorales en leur sein est pleinement réaffirmée.
L’organisation de la pause méridienne repose sur l’autonomie des établissements dont les personnels de direction prennent en compte les spécificités et les contraintes.
Une deuxième version du vade-mecum est à paraître prochainement, remaniant notamment le paragraphe sur les chartes chorales. Ce texte sera complété par un programme.
- Le vade-mecum est un texte qui a été très apprécié. Il est utile, pertinent, précis et construit avec pragmatisme. C’est un outil précieux. Dans quel délai paraîtra le programme ? À ce sujet, nous réaffirmons notre réserve quant à l’inscription d’une liste d’œuvres.
Réponse :
Le programme a été vu en commission spécialisée et passe en CSE le jeudi 12 juillet. Il n’y aura pas de liste d’œuvres précises mais le programme indique que les chorales ajouteront à leur répertoire des œuvres témoignant des valeurs de la république et de la citoyenneté européenne.
- Le plan choral doit reposer sur une formation solide des enseignants du premier et du second degré. Lors de la rencontre avec Marc Olivier Dupin, nous avons évoqué la question des chartes chorales. Il nous semble indispensable que les acteurs de terrain (les enseignants) soient associés au plus tôt dans la mise en place des chartes. Afin que les chartes chorales ne soient pas vécues comme un plan hors sol, descendant, mais bien comme un outil pertinent par les enseignants, nous proposons qu’un binôme professeur d’éducation musicale / professeur des écoles soit désigné dans chaque territoire pour contribuer au pilotage et à la mise en œuvre des chartes, qui densifieront le maillage autour des chartes chorales.
Réponse :
La formation des enseignants du 2nd et 1er degré est une priorité. À ce titre plusieurs dispositifs sont prévus :
Le ministère de la culture consacre 3 millions d’euros aux conservatoires dont les enseignants spécialisés pourront former les enseignants du 1er et du 2nd degré. De même, les chœurs académiques participeront à la formation. Les enseignants, chanteurs sous la direction d’un chef de chœur professionnel, se familiariseront avec la technique et la didactique de la direction de chœur.
Enfin, Marc-Olivier Dupin s’est vu confier la mission de réactiver les chartes chorales. Afin d’être opératives et pertinentes sur le terrain, elles s’inscrivent dans une stratégie de déploiement départemental. Elles auront vocation à financer des projets qui intégreront un volet de formation. En parallèle, deux commissions nationales travailleront sur la formation continue et initiale et sur la création de répertoire. Ces chartes chorales ont vocation à regrouper autour de projets communs les différents acteurs et financeurs : les DRAC, les rectorats, les collectivités territoriales… L’idée d’y ajouter un binôme professeur d’éducation musicale / professeur des écoles pourrait être étudiée.
La question des formateurs mobilisés doit être envisagée au regard des compétences et des spécificités de nos publics et de notre enseignement. En effet, la formation ne peut pas être confiée uniquement aux conservatoires. Les enjeux d’une chorale de maternelle par exemple, les compétences qui doivent mobilisées et les stratégies musicales et pédagogiques sont loin de celles d’un chœur de 2e cycle au conservatoire. Il est judicieux de s’appuyer également sur les formateurs des ESPE. Ainsi, sera-t-il pertinent de faire appel à des personnes ressources identifiées et légitimes sur le territoire.
La musique au lycée
Financement des options facultatives
Plusieurs professeurs de lycée ont alerté l’APÉMu sur la disparition d’heures, voire d’option entière en lycée. Nous sommes en train de questionner tous nos collègues de lycée pour faire un point sur la situation. Financées sur les marges, les options sont des variables d’ajustement dans la DHG des lycées. Les pertes d’heures et les suppressions sont inquiétantes et remettent en cause une égalité dans l’offre de formation sur les tous les territoires.
Enseignements d’exploration
L’enseignement d’exploration « art du son » va disparaître avec la réforme. C’est une réelle inquiétude parce qu’il constituait le vivier de recrutement pour les options de spécialités. Dans plusieurs lycées, cet enseignement, dérogatoire, permettait à un élève réellement motivé par la musique, de poursuivre cet enseignement après le collège. Cette nécessité de continuité fait encore plus sens à l’heure du "plan chorale" où les moyens et les énergies qui y sont consacrés sont importants.
La musique n’est pas un enseignement comme les autres. L’élève musicien, qui se voit refuser l’affection à un lycée où il pourrait poursuivre sa pratique, n’arrête pas la musique pour autant. Il va se tourner vers d’autres structures (conservatoires, écoles privées). Or, l’égalité républicaine n’est plus assurée dans ce cas, tous les élèves n’étant pas en mesure de le faire pour des raisons sociales, culturelles, financières.
Pour toutes ces raisons, nous demandons à ce que l’option facultative musique soit dérogatoire dans le cadre de la réforme à venir.
Spécialités musiques
La réforme offre à l’élève la possibilité, au cycle terminal, de choisir des spécialités (quatre en première, trois en terminale). Nous rejetons la demande d’un cadrage national pour la combinaison des spécialités qui reviendrait peu ou prou aux anciennes séries. Jusqu’alors, la musique était obligatoirement associée aux lettres et aux disciplines littéraires alors que d’autres associations nous semblent encore plus pertinentes. La réforme nous semble une formidable opportunité pour proposer des associations judicieuses sur plusieurs plans :
- les liens entre musique et mathématiques ne sont plus à démontrer ; la connaissance et la pratique de la musique convoquent également les sciences sociales ;
- la demande de pouvoir suivre un enseignement scientifique et musical est récurrente chez les élèves.
- la construction de parcours individualisés permettrait une formation plus complète et plus orientée vers le supérieur. Un ingénieur du son doit maîtriser aussi bien des compétences scientifiques que techniques et évidemment musicales. Un journaliste musical fait appel aussi bien à des connaissances musicales que de sciences sociales et de littérature. Ainsi, ces parcours individualisés, prendraient réellement en compte les souhaits d’orientation des élèves.
Le choix dans le financement des options relève de l’autonomie des établissements. La cohérence de l’offre de formation est supervisée par les rectorats. Très peu d’enseignements optionnels bénéficient de dérogations, c’est le cas de certaines langues rares. La faisabilité de cette demande doit être étudiée. Le choix des spécialités et leurs associations feront partie de l’autonomie des établissements à qui il appartiendra de définir des parcours cohérents avec les demandes, le contexte de l’établissement, les débouchés offerts aux élèves. La réforme est une réelle opportunité pour l’enseignement de la musique au lycée qui pourra faire partie de différents parcours de formation, associée à d’autres disciplines qu’aux lettres.